• Le Duel (2/3) L'amour et la guerre - Jake Vecchiet

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    Résumé :

    Pour sauver la Terre, Wesley doit tuer Orélia. Mais comment prendre la vie de la personne que l'on aime le plus au monde ? C'est sans réponse à cette question que notre héros se rend en Italie accompagné de sa famille, pour contrecarrer le nouveau plan démoniaque de la Darkane. Orélia a besoin du sang de l'Astonien pour alimenter une source de pouvoir destructrice qui n'est pas étrangère au passé mystérieux de Jork. Mais la tâche ne sera pas simple : alors qu'un nouvel ennemi incendiaire menace Naples, l'Astonien doit protéger sa famille de la menace extraterrestre. Et c'est sans compter la jalousie mortelle d'Orélia causée par l'arrivée d'Anna, une humaine qui ne laissera pas Wesley indifférent. Mais entre un espoir de vie normale et un amour impossible, y a-t-il vraiment un choix à faire ?

     

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    Extrait :

    01

     

    La salle était très illuminée, comme dans ses souvenirs. Et quand Wesley balança sa tête en arrière pour regarder le plafond, là où aurait dû se trouver la source de lumière, il put contempler l’océan.

    Ouais, c’est très kitch mais je ne suis pas là pour ça…

     

    La scène se repassait dans ses rêves pour la troisième fois cette semaine. Mais il ne voulut pas précipiter les choses : cette façon de faire n’ayant pas porté ses fruits les deux nuits précédentes.

    Il considéra donc la pièce dans son intégralité, attendant le bon moment.

    Un grand nombre de membres de l’Institution s’affairait, bidouillant ça et là les ordinateurs qui encombraient la salle. Ils étaient tous vêtus de blanc, personne ne s’occupait de son voisin, à l’exception du garde au fond, près de l’escalier.

    La porte qui mène à Orélia, se souvint le jeune homme avec tristesse.

    Il porta son regard à l’autre extrémité : son « moi » du passé n’allait pas tarder à faire son entrée.

    Entre les deux murs, plusieurs dizaines de mètres d’informatique… et une porte. Il ne l’avait pas remarquée lors de son passage dans le vaisseau Darkan.

    Il faut dire que j’étais un peu occupé, quand je suis passé…

    Elle brillait maintenant, d’une lueur surnaturelle qu’il était seul à percevoir.

    Manifestement, c’est cette porte que je dois franchir, alors qu’est-ce qui bloque ?

     

    Une voix lui parvint, sur son côté.

    - Combien de temps avant le début ?

    Réglé comme une horloge, le jeune Astonien fit un pas de côté.

    Un homme passa, juste à l’endroit où Wesley se trouvait une seconde auparavant.

    On ne me fait pas le coup deux fois !

    En effet, la première fois qu’il avait fait ce rêve, l’énergumène était passé au travers de la forme irréelle du jeune homme.

    Ce n’est pas parce que je n’ai pas de substance que je n’ai pas de sentiments !

    L’élu de l’Alliance sourit à sa propre boutade.

     

    Enfin, la porte s’ouvrit. Un Wesley plus jeune passa le seuil. En se rapprochant, Wesley, fantomatique, ne put s’empêcher d’apercevoir le corps de Mike, étendu sans vie, à l’étage inférieur. Le Dastique avait chu dans les escaliers à la suite de sa confrontation avec le jeune homme.

    Bien qu’un peu plus d’un an soit passé depuis cet instant, cette scène continuait de hanter l’Astonien. Bien sûr, plusieurs ennemis avaient péri à cause de la destruction du vaisseau. Mais ici, Mike était véritablement mort de sa main…

    Wesley jeune avait le teint blafard : il venait de tuer, et devrait peut-être recommencer pour survivre. Cette idée le révoltait et le dégoûtait au plus haut point…

    Au moins, ça n’a pas changé.

    L’adolescent de chair et de sang referma précipitamment la porte, et, de peur d’être repéré, se cacha dans l’ombre d’une machine.

    L’Astonien spectateur le vit neutraliser un ennemi et prendre ses vêtements. Il le suivit pas à pas lorsqu’il traversa la salle. Arrivé au niveau de la porte brillante, il bifurqua pour laisser la scène se jouer : Wesley jeune devait rencontrer Orélia…

    Et avoir le cœur brisé…

    L’élu de l’Alliance spectateur devait, quant à lui, se concentrer sur son but.

     

    Le jeune homme se rapprocha doucement de la porte. Il se mordit la lèvre supérieure, jetant un dernier coup d’œil sur le côté. Et approcha une main.

    Rien de tout ceci n’est réel, je dois pouvoir traverser !

    Lorsqu’il se trouva à quelques centimètres du passage, la poignée ronde se mit à vibrer. Wesley retira sa main et la poignée retrouva son immobilité.

    Il prit une profonde inspiration et rapprocha de nouveau sa main de la poignée, les vibrations reprirent de plus belle.

    Alors qu’il insistait, il sentit une résistance : l’air entre ses doigts et la cloison semblait s’épaissir. La porte elle-même tremblait maintenant, on aurait dit qu’elle était sur le point de sortir de ses gonds.

    L’Astonien grommela une injure, poussa sa concentration au maximum et rapprocha encore sa main.

    Les secousses de la porte s’étendirent à la salle entière, ainsi qu’à tous ses occupants. Une migraine terrible prit le jeune homme et toute la scène disparut en un bruyant tremblement.

     

    02

     

    Wesley se réveilla. Il n’avait pas mal à la tête, il ne transpirait pas. Cela faisait bien longtemps qu’il avait réussi à maîtriser cet aspect de ses « prémonitions » nocturnes : isoler le réel du rêve…

    Enfin, sauf sur le plan sentimental !

     

    Il regarda son réveil, fixant quelque chose qui ne s’y trouvait pas… Puis doucement, et sans quitter ses draps, il ouvrit le tiroir de sa table de chevet et en extirpa avec précaution deux photos. Sur l’une, son visage et celui d’Orélia étaient collés et les longs cheveux de la blonde dépassaient sur les siens. Ils partageaient un baiser sur la deuxième.

    L’Astonien ne prit même pas la peine de les retourner pour lire le petit mot : il le connaissait par cœur :

    - « Je garde les deux autres. Merci pour les vacances. Je t’aime. Orélia », chuchota-t-il.

    Il soupira et rangea délicatement les photos à leur place.

     

    A l’époque, ses cheveux étaient blonds. Il les avait rasés dès qu’il était rentré de la plage l’année précédente. Son ancienne couleur lui rappelant trop de – bons et mauvais – souvenirs.

    Mais au cours de l’année, il s’était remémoré des prémonitions qu’il avait eues lorsqu’il avait perdu connaissance sous l’océan.

    Un frisson lui parcourut l’échine quand il se rappela avoir détruit la Terre avec Orélia. Dans sa vision – qui était la pire de toutes – il s’était consacré entièrement à la guerre et avait complètement rasé sa tête. C’était peut être un détail…

    Mais je veux mettre tous les détails différents possibles entre cette vision et la réalité !

    Il s’était donc laissé pousser les cheveux, qui atteignaient presque ses épaules. Ils avaient perdu de leur raideur en poussant et formaient quelques boucles… Le soleil d’été s’était chargé de les rendre châtain clair.

     

    Il sauta hors de son lit. Alors qu’il cherchait dans son placard des vêtements pour la journée, une partie de son esprit refaisait son lit, alors qu’une autre encore ouvrait la fenêtre puis les volets.

    Il passa rapidement un jean et une chemise manches courtes, et se dirigea hors de sa chambre. Il porta un dernier regard sur son lit proprement bordé et respira l’air frais qui pénétrait pas la fenêtre.

    Dieu bénisse la télékinésie !pensa-t-il dans un sourire.

    Il maîtrisait les facultés psychiques primaires avec une facilité déconcertante.

    Il descendit à la cuisine et se prépara un rapide petit-déjeuner quand sa mère entra.

     

    Les choses étaient un peu tendues entre Wesley et ses parents ces derniers jours. Pendant l’année, les notes du jeune homme avaient baissé : il passait beaucoup plus de temps à s’entraîner avec Salatar, son mentor – et professeur de biologie – qu’à travailler.

    Récemment, l’Astonien avait passé ses épreuves du baccalauréat, et les notes étaient tombées la veille. Il l’avait obtenu, mais de peu. Les portes de beaucoup d’universités s’étaient fermées devant les résultats limites de cette année.

    Wesley, habitué à de bien meilleures notes, n’avait trouvé aucun moyen pour expliquer ce phénomène à ses parents, sans justement, leur dévoiler toute la vérité sur son identité et sa mission…

    Je vois bien la scène, tiens ! Maman, papa, vous savez je vous aime beaucoup, seulement vous n’êtes pas mes vrais parents. « Impossible » dis-tu maman ? Parce que vous m’avez vu naître ? Mais non, ce ne sont que de faux souvenirs implantés dans vos mémoires par des êtres de ma planète d’origine : Aston. Pourquoi, papa ? C’est simple, on compte sur moi pour régler une guerre galactique qui dure depuis plus de 3000 ans. Ah, et j’oubliais, je suis un petit peu tombé amoureux de la fille la plus dangereuse de l’univers. Comment ça va se finir ? Oh je sais pas, les possibilités sont toutes plus réjouissantes les unes que les autres, j’en ai vu certaines d’ailleurs… Pour faire simple, ou je la tue, ou elle détruit le monde.

    Voilà… Voilà en gros pourquoi mes notes ont baissé cette année…

    - Salut, lança doucement le jeune homme.

    - Bonjour, lui répondit Loïs sans un regard.

    Ooook, ce n’est toujours pas digéré…

    Il lava son bol et sortit de la maison sans un mot. Il attrapa son vélo contre le mur et descendit la pente douce en direction de la maison de Salatar. La calme brise faisait voler agréablement ses cheveux, rafraîchissant la nuque de l’Astonien.

     

    Arrivé devant sa porte, Wesley frappa énergiquement. Il sentit l’odeur mentale de menthe qui émanait de son professeur Zirien qui ouvrit rapidement.

    - Bonjour Wesley, tu as amené ton livret de biologie ? demanda Salatar, soucieux des apparences.

    Heu…

    L’Astonien regarda furtivement à droite et à gauche… personne. Et il leva ses mains vides au ciel, impuissant.

    - Pas vraiment, s’excusa-t-il.

    L’enseignant poussa un soupir sonore, et l’invita à entrer.

     

    Ils se rendirent dans le salon. Le regard de l’adolescent se posa sur les deux fauteuils en cuir. Son professeur vivait seul, mais un jour, Wesley l’avait entendu dire que la guerre lui avait pris beaucoup.

    Un sentiment de pitié prenait toujours le jeune homme quand il traversait ce grand salon qui semblait si propice aux longues soirées de vieux couples…

     

    Salatar posa un regard sur la fenêtre et le store se baissa immédiatement, laissant les deux compères dans le noir.

    - Wesley, j’aimerais que tu crées de la lumière, s’il te plait.

    Le jeune homme se concentra une seconde et le lustre s’éclaira au dessus de leur tête.

    De nouveau, l’enseignant soupira.

    - Sans utiliser l’interrupteur par télékinésie, précisa-t-il.

    Je peux pas deviner tout seul, pensa l’Astonien bougon.

    L’adolescent se concentra et tendit sa main. Il réfléchit un instant, se demandant s’il devait sortir le grand jeu.

    Jouons la plutôt modeste.

    Une flamme apparut à quelques centimètres de sa paume, léchant l’air et baignant la pièce d’une lueur orangée.

    Le professeur acquiesça sans un mot. Il se rapprocha du mur et posa sa main contre. Soudain, la paroi s’ouvrit en deux, dévoilant la pièce secrète.

     

    Wesley l’avait vue à plusieurs reprises : tous les biens extraterrestres de Salatar étaient entreposés ici. Il saisit un livre et sortit de la pièce. La cloison reprit sa place.

    De jour en jour, le livre était toujours le même.

    Sur sa couverture, se trouvait une étoile qui dardait ses rayons : un cercle de quelques centimètres de diamètre entouré de quelques triangles… Le symbole de la planète Aston.

     

    Finalement, les deux aliens s’installèrent dans la cour, comme à leur habitude. Ils s’assirent dans les chaises de jardins et Salatar posa le livre sur ses genoux.

    Wesley réprima une grimace : le professeur prenait inlassablement le livre pendant ses leçons, alors qu’il lui avait conté déjà toute l’histoire de l’Alliance. Parfois même, le livre restait fermé durant la matinée entière. C’était devenu plus un rituel qu’autre chose.

     

    Jork l’avait mis en garde plusieurs fois sur la véracité des textes de l’enseignant… D’ailleurs, son ami se mettait toujours sur la défensive lorsqu’il leur arrivait de discuter de Salatar…

    Ou de la guerre en général, songea l’Astonien.

     

    Le maître sortit de sa poche l’holographe et le déclencha.

    La leçon pour développer les capacités mentales du jeune homme commençait, alors que le reste du monde, s’il assistait à la scène, penserait qu’un professeur barbait son élève avec un cours particulier.

    - As-tu réussi à franchir la porte, dans ton rêve ? demanda le Zirien.

    - Non, toute la pièce se met à vibrer et je suis expulsé du rêve. Je ne comprends pas, j’en ai fait plein cette année, et avec celui la… Impossible d’entrer.

    L’enseignant croisa ses jambes et mit un doigt sur sa bouche, en signe de réflexion.

    - Je me demande si le Darkan n’essaie pas de bloquer tes capacités…

     

    L’adolescent sentit une vague de culpabilité l’envahir.

    Il n’avait pas dit à son maître toute la vérité… En fait, il avait carrément menti sur toute la ligne !

    Salatar ne savait pas que le Darkan était une fille : Orélia, que Wesley était tombé amoureux d’elle, qu’il lui avait sauvé la vie, puis qu’elle avait fait de même, un peu plus tard.

    Wesley avait inventé qu’il avait pris le livre d’Elkacy au Darkan, à la suite d’une bataille et que celui-ci lui avait conféré de nouveaux pouvoirs. Cette toute dernière partie était vraie…

    Quant à Jork, Salatar ignorait jusqu’à son existence… L’extraterrestre changeur de forme n’avait jamais avoué pourquoi il désirait garder l’anonymat.

    - Je le saurais si le Darkan était dans les parages, assura finalement Wesley.

     

    Cela faisait longtemps maintenant, que les pouvoirs du jeune homme avaient dépassé ceux de son maître. L’unique rôle de ce dernier désormais, était de lui apprendre à mieux les contrôler… Ce qui restait assez compliqué par moments.

    - On va recommencer le même exercice qu’hier, il faut que tu le réussisses.

    L’Astonien se leva de sa chaise et tourna le dos à Salatar en levant les yeux au ciel. Il n’appréciait pas particulièrement cet entraînement.

    Plusieurs minutes passèrent, Wesley essaya de se relaxer, ne sachant pas à quel instant il allait être frappé.

    Soudain, une douleur lancinante le prit au creux des reins. Le jeune homme cria de surprise. Involontairement, ses poings se contractèrent ainsi que tout son corps. Mais il ne put empêcher l’inévitable : une vague d’énergie circulaire émana de son corps, envoyant les chaises et mentor à plusieurs mètres de là.

    Les pierres furent éjectées contre la clôture et un violent courant d’air secoua le grand arbre.

    L’adolescent se retourna, penaud.

    - Je suis désolé, marmonna-t-il en ramassant la balle de métal qui lui avait percuté le dos.

    Puis il alla tendre la main à Salatar, pour l’aider à se relever, et partit chercher le livre d’Aston quelques mètres plus loin.

     

    - Toutes tes capacités ne te servent à rien si tu ne peux pas les contrôler, insista le Zirien.

    Par réflexe, un champ de protection s’était créé dès que la balle de métal avait touché l’Astonien.

    - C’est un mécanisme de défense, je ne peux pas le contrôler !

    - Il le faut. Tu dois te concentrer ! Ne laisse pas tes pouvoirs être maîtres de toi.

    Ils recommencèrent plusieurs fois, en vain. A chaque fois, en accusant le coup, le corps de Wesley envoyait une salve d’énergie qui balayait tout sur son passage.

    Plusieurs exercices suivirent, le niveau du jeune homme avait considérablement augmenté en un an. Cependant, certaines techniques de contrôle mental lui résistaient… Comme la persuasion, par exemple.

    Orélia maîtrisait très bien cette technique, se dit l’Astonien en repensant à la manière dont son ex petite amie avait dissuadé un animateur de les changer de chambre l’année précédente.

    Elle a aussi réussi à effacer la mémoire de toutes les personnes qui ont survécu à l’explosion du vaisseau spatial !

     

    03

     

    A la fin de la séance, qui dura un peu plus d’une heure, Wesley remonta à vélo et se dirigea vers la colline derrière sa maison.

    Il s’arrêta sous les pins et bloqua sa bicyclette contre un gros rocher : le point de rendez-vous.

    - Jork, appela-t-il, utilisant ses mains pour amplifier sa voix.

    Quelques minutes passèrent, l’adolescent réitéra son appel puis il sentit l’odeur de miel de son ami.

    < Salut Wes. >

    Le jeune homme avait entendu résonner les paroles dans sa tête. Un écureuil descendit sur une branche basse.

    Par la pensée, l’Astonien le fit voleter jusqu’à lui et le déposa sur son épaule. Il remonta sur son vélo avec l’animal et se dirigea vers sa maison.

     

    < La leçon s’est bien passée ? >

    - Ouais. J’arrive toujours pas à contrôler l’impulsion quand je suis agressé… Sinon, j’ai refait le même rêve, et je bloque en essayant de franchir la porte. Tu te souvenais de cette porte quand on est passé dans la salle l’année dernière ?

    < Non, mais j’étais sous la forme d’un léopard avec la moitié du vaisseau à mes trousses… >

    Ouais, c’est sûr, ça non plus, ça ne facilite pas la concentration…

    Wesley s’apprêtait à redemander à son ami pourquoi il ne voulait pas que Salatar connaisse son existence, mais il se résigna finalement. Cela avait été leur seule source de discorde depuis leur première rencontre. Et l’adolescent ne se sentait pas d’endurer une dispute avec son – seul – ami.

    C’est vrai que ce genre de quête a tendance à flinguer la vie sociale des gens…

    Jork lui dirait la vérité quand il se sentirait prêt.

     

    Le jeune homme aperçut une grande voiture garée dans son allée, ses voisins devaient s’apprêter à partir sur la plage…

    Finalement Wesley arriva dans son jardin, où il laissa négligemment son vélo. Il fronça les sourcils.

    Pourquoi les volets sont fermés ?

    Lorsqu’il arriva sur le seuil de la porte, plusieurs parfums psychiques infiltrèrent son cerveau. Il se plaqua contre le mur.

    - Il y a quelqu’un chez moi, Jork, fais le tour par ma chambre ! chuchota-t-il.

    L’écureuil grimpa sur la toiture et entra par la fenêtre ouverte. Une fois sur le lit, il sauta sur la poignée de la porte pour l’ouvrir et se glissa dans le salon.

    Pendant ce temps, Wesley avait appelé Salatar de son portable :

    - L’Institution est chez moi, sans le Darkan, précisa-t-il.

    Sinon j’aurais senti l’odeur de vanille d’Orélia, ajouta-t-il pour lui-même.

    Son professeur allait arriver, en attendant il était seul, il devait patienter, priant pour que ses parents soient sortis.

     

    < Wes, il y en a cinq, il n’y a pas Orélia… Ils tiennent tes parents. Deux dans l’entrée, les trois autres sont dans la cuisine avec Loïs et Marc. Ils vont bien, mais ils ont l’air très effrayés, je pense qu’ils leur ont fait une démonstration de leurs pouvoirs. >

    Jork lui donnait le plus d’informations possibles car son ami ne pouvait pas lui répondre. Seul l’écureuil pouvait s’adresser aux autres par télépathie…

    < Et si tu te poses la question, je ne peux pas t’aider, ça ne fait qu’une demi-heure que je suis sous cette forme… >

    Encore trente minutes avant qu’il ne change à nouveau de forme, et rien ne nous garantit que ce sera un animal doué pour le combat…

     

    Je ne peux pas laisser plus longtemps mes parents en danger !

    Wesley tendit la main : la porte sortit de ses gonds pour se fracasser plusieurs mètres plus loin. Un homme se trouvait derrière et fut écrasé par la masse qui l’emporta dans son sillon.

    Un autre était sur le côté et l’Astonien l’électrocuta : des éclairs avaient fusé de ses mains pour laisser l’alien inconscient.

    - Si tu bouges, je les tue, annonça une voix.

    Le jeune homme contourna le mur et approcha de la cuisine, les mains en l’air. Les trois extraterrestres se trouvaient derrière ses parents – qui n’avaient pas vu les prouesses de leur fils. Des couteaux de cuisine dansaient dans l’air autour de la gorge de son père et de sa mère.

    Wesley déglutit difficilement.

    - Wes pars ! Cours, dépêche toi ! cria Marc – son père. Tu ne sais pas de quoi ils sont capables !

    - Si je sais, murmura l’adolescent.

    Il dévisagea ses trois adversaires restants : deux sentaient la noix de coco.

    Elle m’a envoyé des Dastiques, comme Lyle et Mike, songea le jeune homme.

    Le dernier dégageait une odeur poivrée…

    Les deux Dastiques avait une apparence humaine, mais le dernier avait des airs de reptile avec ses pupilles verticales et ses crêtes vertes au niveau de la tête et des avant-bras.

     

    - Si vous touchez à mes parents, je vous détruirais. Si vous touchez à mes parents, Orélia vous tuera, assura Wesley.

    Marc et Loïs s’apprêtèrent à ouvrir la bouche mais les couteaux se rapprochèrent de leur gorge. L’adolescent serra les poings, incertain de pouvoir se contrôler encore longtemps.

    - Nous sommes ici selon ses ordres, répliqua un Dastique.

    L’Astonien n’arrivait pas à imaginer qu’Orélia puisse s’en prendre à ses parents. Mais pour l’instant, il devait rester concentré sur la situation : tout pouvait déraper très vite.

    Les lames étaient trop proches de sa famille, aucune chance qu’il ne mette K.O. les trois avant qu’au moins un n’ait pu… Wesley en eut la nausée.

     

    - Qu’est-ce que vous voulez ? lança le jeune homme avec agressivité.

    - Ton sang.

    Elle fait dans les vampires maintenant ?

    Un Dastique désigna une valise en métal posée sur la table, près de Wesley.

    L’adolescent s’en approcha et l’ouvrit par la pensée. Seule une aiguille s’y trouvait, bloquée dans de la mousse synthétique.

    L’Astonien réfléchit un instant, mais le choix était fait – si choix, il y avait !

    Peut-être qu’il aurait eu le temps d’ériger un champ de force autour de ses parents pour les protéger, mais un « peut-être » était insuffisant quand la vie des personnes qu’il chérissait le plus était en jeu.

    - Vous prenez mon sang, et vous partez. Si je vous revois un jour, je vous tue, annonça-t-il.

    - Garde tes menaces, siffla face d’iguane en se rapprochant de lui.

    Il se saisit de la seringue et sortit un élastique de sa poche, pour lui faire un garrot sous l’épaule.

    Elle ordonne de menacer mes parents, mais elle les force à me faire un garrot avant de prendre mon sang, elle est cinglée !

    L’alien reptilien n’était pas tranquille : il tremblait pratiquement et suait à grosses gouttes. Il avait probablement conscience que si quelque chose tournait mal, il serait le premier à déguster.

    Wesley vit vaguement que le garde de l’Institution, écrasé par la porte, s’était relevé et en profitait pour traîner le corps inanimé de son allié hors de la maison.

    - Je vais piquer maintenant, annonça faiblement face d’iguane.

    L’adolescent lui jeta un regard noir.

    Bande de lâches, même tous ensemble ils n’auraient aucune chance s’ils ne tenaient pas mes parents…Et ils le savent.

     

    Face d’iguane lui préleva un peu de sang et replaça la seringue pleine dans son étui de mousse. Puis il referma la valise en métal.

    Enfin il posa un morceau de coton sur la goutte de sang qui perlait du bras de Wesley et l’attacha avec un morceau d’adhésif.

    Le jeune homme lui lança un regard qui disait clairement : « tu te fous de moi ? »

    L’extraterrestre recula doucement vers la porte, sans lâcher Wesley des yeux.

    - Ok, on va tous s’éloigner avec tes parents. Dès qu’on sera parti, on relâchera notre emprise sur les couteaux, expliqua-t-il.

     

    L’Astonien ne fit aucun geste menaçant, il entendit une voiture se rapprocher de leur terrain – probablement celle qu’il avait aperçue en arrivant en vélo.

    Face d’iguane était sorti. Les deux Dastiques commencèrent à se rapprocher de la porte d’entrée. Wesley les suivit, les mains en l’air.

    - Vous ne bougez pas ! ordonna un des aliens à Loïs et Marc.

    Il les planta sur le seuil, mais maintint son pouvoir sur les lames qui continuaient à évoluer dangereusement autour du cou des deux humains.

    Tu viens de faire une boulette !

     

    Quatre des cinq membres de l’Institution se trouvaient maintenant dans la voiture, et il n’y avait plus personne entre Wesley et ses parents.

    Il érigea un mur entourant ses parents : quoi qu’il puisse se passer maintenant, eux étaient hors de danger.

    Le jeune homme prit le contrôle des couteaux, il n’eut aucun mal à écraser l’esprit du Dastique qui cherchait à rejoindre la voiture.

    - Rentrez ! hurla l’adolescent à ses parents.

    Surpris, ces derniers coururent à l’intérieur.

    L’Astonien projeta les ustensiles de cuisine sur le Dastique. Un couteau lui transperça l’épaule, un second entama son flanc, alors que les autres ne lui infligèrent que de mineures coupures.

    La pitié de Wesley avait disparu, et même s’il n’était toujours pas prêt à prendre la vie de qui que ce soit, il se trouvait dans un tel état de rage que cela ne lui posait aucun problème d’envoyer ces cinq là en chirurgie.

     

    Alors que le Dastique s’effondrait en hurlant – sa chemise s’imbibant de plus en plus de sang – la voiture démarra en trombe, faisant crisser les roues dans le gravier.

    Wesley courut vers la voiture. En passant à côté du Dastique blessé, il posa une main sur sa nuque et lui fit perdre connaissance.

    L’écureuil s’était rapproché de son ami.

     

    Dans la voiture, à la place du passager avant, face d’iguane passa un coup de fil :

    - Nous avons son sang. Prévenez le maître Darkan. Renvoyez la deuxième équipe en place pour reprendre le blocage.

    Puis il raccrocha, manifestement satisfait.

    - Notre maître est faible. Il serait si simple de le tuer, en s’attaquant à ses parents, lança un mercenaire à l’arrière.

    L’alien reptilien se retourna et attrapa son allié par la gorge.

    - Ferme-la idiot ! Ses pouvoirs sont bien au-delà de tes capacités. Elle pourrait même t’entendre, expliqua-t-il, lançant dans la voiture des coups d’œil paranoïaques.

     

    - Jork, mes parents vont bien ?

    < Encore un peu secoués mais ils n’ont rien. Wesley, qu’attends tu pour arrêter la voiture ? >

    - Quoi ? Je ne vois pas comment je peux l’arrêter sans les tuer tous !

    Jork hurlait maintenant dans la tête du jeune homme, augmentant la pression d’encore un cran.

    < Ils auraient pu tuer tes parents ! Cette folle psychopathe a envoyé ses hommes de main chez toi ! Wesley, vous ne serez jamais tranquilles tant qu’ils ne seront pas tous morts et enterrés ! >

    - La ferme !

    Le ton était monté beaucoup plus vite que Wesley n’aurait voulu. Il n’arrivait que difficilement à bloquer la haine et la rage qui avaient envahi son esprit.

    < Tu veux revenir un jour et voir tes parents morts, baignant dans leur propre sang ?! >

    - La ferme ! La ferme ! LA FERME !

    Une explosion retentit.

     

    L’Astonien se retourna. La voiture venait d’exploser, avec ses quatre ennemis à l’intérieur. Un frisson parcourut sa nuque et il se retourna vers Jork.

    < Je suis désolé. > dit ce dernier simplement. Mais son ton était ferme.

    La bouche de Wesley était entrouverte.

    Tu n’es pas désolé du tout. Tu as fait ça exprès. Tu m’as poussé à bout pour que je perde le contrôle. Tu m’as fait exploser cette voiture ! Tu m’as fait tuer ces gens !

    Il aurait voulut hurler, mais aucun son ne voulait passer le seuil de ses lèvres.

    Pendant quelques secondes, il ne réagit pas, atterré. Il n’en revenait pas.

    Ce… Ce n’est pas possible…

     

    Puis il redevint maître de lui-même et se précipita en courant vers la voiture. Elle avait explosé sur le petit chemin. Les flammes dévoraient la carrosserie.

    En arrivant à quelques mètres, Wesley fit éclater les quatre portières qui volèrent en tous sens.

    Rien ne semblait plus bouger à l’intérieur.

    Non ! Non !

    Ils se rapprocha et vit trois formes carbonisées sur les sièges. Il étouffa un haut le cœur.

    Sur le siège du conducteur, un Dastique se détacha et détala, prenant Wesley de vitesse. L’Astonien le projeta à terre, par la pensée.

    En levant la main, il projeta son ennemi contre un arbre. Il n’était pas en bon état : il avait de multiples brûlures, ses vêtements étaient déchirés par endroits. Mais il survivrait.

    Il essaya de bouger, mais l’esprit de l’adolescent, bien plus puissant que le sien, le maintenait fermement ancré contre l’écorce.

    Wesley avait les larmes aux yeux, ses joues étaient rougies par l’énervement. Il y avait trop de sentiments différents en lui, trop de confusion. Cependant, s’il y en avait un qui primait, c’était la colère.

    - Ecoute moi bien sale bâtard ! Tu vas passer un message à ta patronne. Tu as vu ce que je viens de faire à tes petits copains ?

    Les yeux du Dastique passèrent du regard haineux de l’Astonien à la voiture calcinée. Il acquiesça, terrorisé.

    - Dis-lui que si jamais un de ses esclaves dégénérés s’en reprend un jour à ma famille, ce sera de la rigolade à côté de ce que je vous ferais subir à tous ! C’est clair ?

    De nouveau, l’extraterrestre acquiesça vivement.

    Wesley le laissa tomber sur le sol. Et en un regard, il fit glisser sans ménagement son ennemi sur plusieurs mètres contre le sol rugueux.

    Il était hors de question qu’il tourne le dos à un adversaire alors qu’il se trouvait à un pas de lui…


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